F l e u r s    d e    l a    t o u n d r a

 

La toundra se situe au-delà de la limite forestière. En Arctique de l’est, on ne compte qu’une moyenne de 40 jours sans gel, ne permettant pas au pergélisol de dégeler.
Il existe deux régions de toundra. Les plaines de dépôt glaciaires avec débris rocheux, où l’on trouve des graminées et des fleurs comme le pavot safrané, le pissenlit arctique ou la dryade à feuilles entières. Alors que les hautes terres rocailleuses abritent plutôt des arbustes comme le boulot nain et le thé du labrador, les fougères arctiques et les lichens.
Le sol de la toundra est acide, mince et pauvre. On remarque qu’il y a peu d’humus (partie fertile du sol, née de la décomposition des matières végétales) car la végétation est trop clairsemée.

La flore de la toundra arctique (environ 200 espèces de fleurs et un très grand nombre de lichen et de mousse) a su s’adapter au climat et aux étés courts mais aux longues heures d’ensoleillement. La plupart germent ainsi à partir des tiges et des racines existantes. Le taux de reproduction est plus lent que dans les régions plus au sud. Le vent, la neige et la température excessivement basse ont conditionné la flore à croître souvent en un tapis bas et touffu ce qui lui permet de se protéger. En hiver, par exemple, rien ne dépassera de la surface neigeuse et ventée. L’air est également plus chaud au ras du sol ce qui permet une meilleur croissance. D’autres fleurs vont se protéger du froid en formant une tige velue et une enveloppe laineuse autour des graines pour les isoler. Certaines se servent aussi d’une pigmentation foncée pour absorber la chaleur du soleil.
Les racines sont également plus courtes car seuls 5 à 50 centimètres du sol réussi à dégeler. Le pergélisol retient l’humidité des couches supérieures ce qui favorise la croissance des végétaux.
La flore est aussi la base de la nourriture des herbivores qui peuplent la toundra, comme le caribou ou le lièvre arctique. Les Inuit consomment essentiellement les baies qui sont nombreuses.

Voici quelques exemples des fleurs que l'on peut voir dans la toundra avoisinante d'Iqaluit.
Les lichens : quajautit

Il existe une grande variété de lichens (Xanthoria elegans, umbilicaria sp….), nés de la symbiose de deux plantes, un champignon et une algue. Cette dernière permet la photosynthèse et utilise les rayons du soleil pour produire de la nourriture que va absorber le champignon qui doit à son tour protéger les cellules algales contre la dessiccation et l’excès de lumière afin que elles puissent croître et se reproduire. Mais les scientifiques ne sont pas tout à fait sûrs de son rôle et beaucoup pensent que la symbiose est plus un phénomène de parasitage du champignon sur l’algue.
Le caribou et le bœuf musqué, plus occasionnellement, consomment le lichen en été et servent au processus de colonisation de cette plante sur les roches stables ou les anciennes plages. Il permet de stabiliser le sol grâce à son réseau étendu et donne la possibilité à d’autres plantes de s’établir à leur tour. Ces étapes contribuent à la fabrication de l’humus qui construit un sol pouvant supporter de plus en plus d’espèces végétales.
Cependant, le lichen est très sensible à la pollution de l’air par le dioxyde de souffre entre autre.

 

 

 


Epilobe à feuilles larges : epilobium latifolium

On peut la voir s’étendre partout comme de la mauvaise herbe. Ses fleurs, environ 2 à 5 cm de diamètre, sont très voyantes avec leur 4 larges pétales rose violet alternant avec 4 sépales plus foncées et étroites. Les feuilles sont gris vert et ovales.

 

 

 



Oxytropis de Maydell : oxytropis maydelliana

Elle appartient à la famille des légumineuses comme le lupin arctique (lupinus articus).
Ces fleurs jaunes sont regroupées en grappes, nées d’une tige sans feuille. Elle contient de la locoïne qui, si elle est ingérée, peut entraîner des pertes de contrôle musculaire, des évanouissements et même la mort.

 

Le coton arctique ou linaigrette : eriophorum sp. : kanguujat

Il appartient à la famille des laîches ou carex. On compte 6 espèces de Eriophorum.
Il pousse dans les zones marécageuses et humides.
Il existe environ 100 espèces de laîches dans les Territoires du Nord-ouest que l’on peut confondre avec les joncs.
La tête de cette plante est une étrange fleur avec des pétales constituée de mèches blanches et soyeuses qui se dispersent au gré du vent. Le coton arctique peut former des touffes d’herbes afin d’emmagasiner de l’humidité. Ces touffes sont plus résistantes, notamment au feu.
Il était aussi traditionnellement utilisé par les inuit comme mèches pour les qulliq (lampes à huile), pour bourrer les matelas et servir comme amadou pour démarrer le feu.
 

Pavot safrané : Papaver radicatum

De la famille des pavots (papaveraceae). Ce sont de vrais capteurs solaires grâce à la forme de ses fleurs qui collectent et réfléchissent les rayons du soleil. Ce processus augmente la température au centre de la fleur ce qui permet une croissance plus rapide des graines. De plus, le mouvement de rotation vers le soleil permet à la fleur de garder un contact constant avec les rayons solaires. La fleur atteint environ 12 à 20 cm de haut et les pétales sont jaune pâle. Avant l’éclosion, le pavot forme des capsules entourées de poils foncés qui captent la chaleur du soleil pour que les graines se développent.
Ce groupe est très complexe car il est constitué de plantes dont le nombre de chromosomes peut varier ce qui rend l’identification difficile. Il existe en Arctique environ 3 à 4 espèces de pavots, le plus commun étant le radicatum. Il existe aussi le P. hultenii, plus grand qui comme le radicatum vit sur un sol bien drainé ; le P. keelei avec des feuilles vert foncé sur un sol humide et le P. cornwallisensis qui se développe sur un sol plus calcaire et humide.

 

Pyrole à grandes fleurs : pyrola grandiflora

De la famille des gaulthéries.
Une tige rougeâtre de 10 à 15 cm porte une grappe de petites fleurs blanches à 5 pétales, 5 sépales et 8 à 10 étamines proéminentes et avec un doux parfum. Les fleurs sont relativement grandes avec un diamètre de 2 cm et font face au sol lorsqu’elles s’ouvrent puis se placent à l’horizontal lorsqu’elles sont matûrent. C’est à la mi-juillet que l’on peut les admirer à leur apogée.

 

Raisin d’ ours : arctostaphylos sp. : kaplarjuit

Il en existe des noires (arctostaphylos alpina) et des rouges (arctostaphylos rubra). C’est cette dernière que j’ai pu observer. Egalement de la famille des baies, elles s’étendent en tapis et se mélangent parfois aux canneberges et aux myrtilles (vaccinium uliginasum : kigutangirmat). Leurs feuilles peuvent facilement se confondrent avec celles du saule réticulé mais la distinction se fait par le touché. Les feuilles de raisin d’ours sont plus fines et plus flexibles. Les fleurs se forment tôt dans le printemps. Elles sont vert blanc en forme d’urne, tête en bas. Le fruit devient écarlate entre la fin août et début septembre. Comme les autres baies, les fruits sont mangés par les oiseaux, les mammifères, incluant l’ours, et les Inuit. Leur goût est plus insipide mais les Inuit les mélangent souvent avec d’autres baies.

 

Silène acaule : silene acaulis

Elles vivent dans des conditions très dures et sèches, sur des sols sablonneux ou dans les fissures des rochers. Elles développent de grandes racines qui permettent à la plante de se fixer et d’extraire en profondeur l’eau et les nutriments nécessaires.
Pour se protéger du vent sec de l’hiver et de la neige, les feuilles et les branches s’étendent en un coussin compact ne laissant rien apparaître à la surface. En été, cette forme permet une exposition maximale pour une photosynthèse des feuilles. Les fleurs sont généralement de couleur magenta, mais il existe une rare variante en blanc. Elles ont un diamètre d’environ 1 à 1.5 cm et s’étendent sur le coussin. La pollinisation s’effectue par les insectes.

 

Dryade à feuille entière : dryas integrifolia : malikkat

Cette fleur est l’emblème officiel des Territoires du Nord-Ouest. Ses pétales sont d’un jaune blanc crémeux et les feuilles vert foncé. La plante, dont la tige poilue ne produit qu’une seule fleur d’environ 2.5 cm de diamètre, mesure 4 à 12 cm de haut.
Comme la famille des pavots, elle collecte la chaleur du soleil avec une forme parabolique et tourne en fonction du soleil. C’est aussi un indicateur de présence de calcium et pousse sur un sol calcaire.
La plante forme un épais tapis de racines entrelacées qui stabilisent le sol et l’agrippe. Les branches et les feuilles capturent la poussière, saletés et feuilles mortes et les transforment en un humus épais. Cette plante enrichit le sol de nitrates via l’utilisation de bactéries.

 

Canneberges, mûres : Emetrum nigrum : paungait

La famille des baies produit de nombreux fruits qui sont très appréciés non seulement des mammifères, des oiseaux mais aussi des Inuit qui les consomment fraîches, cueillies fin août-début septembre. Ces plantes couvrent de grandes étendues dont le sol est de préférence acide et sablonneux. Il y a des plantes mâles et femelles qui sont séparées. Comme les femelles, les mâles produisent des fleurs rouges mais d’une brillance plus intense. Lorsque les fruits apparaissent, ils sont verts et noircissent lorsqu’ils mûrissent. Ces plantes donnent des fruits à 4 grosses graines en abondance.

 

 


Céraiste vulgaire : cerastium fontanum Baumg.

Elle produit des fleurs blanches à 5 pétales sur une tige d’environ 30 cm de haut. On les trouve souvent dans les aires de nidation d’oiseaux où le sol a été enrichi par leurs déjections.

 

 

 


Thé du Labrador : ledum decumbens : qisiqtuti

Il est souvent utilisé comme bois de feu par les Inuit, car il brûle même vert.
Ses feuilles étroites, toujours vertes, dont les bords s’enroulent, excèdent rarement 15 cm de haut. Quand on les écrase, un arôme fort s’en dégage.
Lorsqu’il fleuri, le thé du Labrador développe des fleurs blanches à 5 pétales et 10 étamines proéminentes qui se regroupent en un petit bouquet.
Certains disent qu’on peut l’utiliser comme thé mais il faut faire attention car cette plante contient une toxine qui peut causer des crampes et une paralysie surtout chez les personnes âgées.

 

 


Œillet marin ou gazon d’Olympe : armeria maritima

Cette fleur se présente sous la forme d’un mini bouquet de fleurs roses sur une même tige mince. Les feuilles fines et linéaires se rassemblent à la base. Quand les fleurs émergent, elles sont presque rouges mais deviennent roses en éclosant.
Elles apparaissent à la fonte des neiges au printemps et peuvent se confondre avec la ciboulette sauvage qui se distingue tout de même par des feuilles odorant l’oignon.
Cette espèce est très courante dans les régions alpines d’Europe et sont souvent cultivées comme plantes de rocailles dans les jardins.

 


Bibliographie :

La flore des Territoires du Nord-ouest, série « renseignements sur le Nord », Government Services and public works, 1993

Barrenland beauties, showy plants of the Canadian Arctic, Page Burt, The Northern Publishers, Yellowknife, 2000

Wildflowers of Churchill and Hudson Bay Region, Karen L. Johnson, Manitoba Museum of Man and Nature, Winnipeg, 1987

The Nunavut Handbook, Ed. Soubliere, Nortext, Ottawa, 1999